Fin des cours à Bamako,Tombouctou j'arrive...

 

Credit Photo: Faty
Credit Photo: Faty

 

C’est le même rituel depuis que l’enseignement normal existe. Le CFTQ est la place to be, pour tout enseignant  de l’enseignement normal, par amour du devoir bien fait, peut-être mais c’est surtout  pour les indemnités auxquelles ces corrections donnent droit. En effet nous ne sommes plus aux années de Moussa Traoré, Où la correction d’une feuille coutait à peine 100 FCFA. Maintenant elles rapportent des sommes rondelettes si le lot de feuille corrigé est important : 460 FCFA par feuille.  Quand on connait l’attrait de l’enseignant pour l’argent !

Je suis de l’exercice depuis juillet 2008, j’ai bien failli ne pas y être l’année dernière  avec la disparition de mon nom des proposés à la correction (je me demande si mon nom n’est pas tombé dans le fleuve pendant notre repli stratégique vers Bamako). Avoir aidé au travail administratif et joué le rôle du directeur des études jusqu’à la veille de la rentrée scolaire 2012-2013 ne m’ont en rien servi. Quand tu es une femme, dans un monde d’arabisant, reste à ta place. Tu as plus de chance de t’attirer leurs courroux que d’être proposée à un poste de responsabilité. J’en ai fait l’expérience. Pas si triste que ça ! C’est une autre leçon de la vie. Ce ne sont pas seulement les voix du seigneur qui sont impénétrables, ceux du monde des enseignants maliens aussi !

Cette année encore nous revoilà sur les bancs si peu confortables de cet établissement privé qui s’étend sur deux étages comme un château-fort, d’un blanc sale bien sale.  Le roi qui règne sur ce royaume s’appelle Amadou Alpha, du CECE (centre des examens et concours de l’éducation) . Un homme d’une rigueur bien exemplaire, si ce n’est cela j’imagine la cacophonie qui règnerait. D’aucuns sont prêts à tout pour mériter son estime pour être toujours convoqué.

Avant cette crise du nord et notre (nous enseignant, élèves-maitres, administration de l’IFM Hégire de Tombouctou) fuite en avant vers Bamako, la correction était bien intéressante car en plus des frais de séjour, nous profitions d’une somme forfaitaire pour le transport (des mois après hein !). Mais notre déception a été grande de constater en juillet dernier que la décision de relocalisation de notre établissement à Bamako nous privait de ce que nous voyions comme des avantages. Quelle frustration de voir ceux qui viennent de Kati en profiter, mais c’est le Mali… tout s’y fait et se cautionne. Cette année, mon jeune collègue qui en est à sa première correction a bien haussé la voix en répétant «  et ceux qui viennent de Tombouctou ! ». Silence. Pas une réplique. Sa voix a bien résonnée, emplissant la salle. Les agents du CECE chargés de cette besogne s’en sont allés sans lui répondre. «  Cela veut dire que c’est une cause perdue Birma ! Ils t’entendent bien,  c’était pareille l’année dernière » lui dis-je.

Je suis bien professeur de psychopédagogie, mais j’ai toujours été de la commission LMP (législation scolaire et morale professionnelle)-philosophie-ECM (éducation civique et morale). Ces deux dernières années il faut reconnaitre que le nombre des correcteurs a bien augmenté, faisant fondre nos gains comme peau de chagrin.

Les sujets de cette année même certains de philosophie, cadrent plutôt avec l’actualité.  « La religion ne peut-elle se propager que par la violence ? »,  « Nous sommes responsables de nos actes mais pas du destin », bien qu’il y ait eu les sempiternelles sujets sur la relation philosophie-religion-science société-pensée.

Les sujets de législation scolaire et Morale professionnelle LMP, s’articulent autour du comportement adéquat pour un enseignant, soit à l’école, en société, avec son employeur, ses droits, ses devoirs… Le sujet 2 de l’examen de passage de la 2ème à la 3ème année de l’IFM hégire s’intitulait : « la législation scolaire constitue un guide pour l’enseignant » explique cette pensée et donne des exemples dans la vie de l’enseignant permettant de l’illustrer.

Sujet bien abordable dirait qui connait le contenu du cours que nous avons vu en classe. Mais je suis bien désolée de vous dire que mes élèves ne pourront pas  bien le traiter car ils se buteront à des mots qui sont bien ‘’durs ‘’ pour leur niveau en français.  Il  s’agit de « guide » et « illustrer » les mots clés du sujet.

Le système ne me permet même pas d’avoir à corriger leurs copies d’examens, mais il faudrait bien expliquer aux autres correcteurs les difficultés que mes élèves ont en français (en arabe aussi d’ailleurs, les élèves maliens ont tous des difficultés dans tous les domaines conséquence d’un niveau bas qui ne cesse de s’affaisser.

Le sujet1 des élèves en passage en 3ème année généraliste  niveau DEF  évoque la conscience professionnelle chez l’enseignant qui serait le résultat d’un certain nombre de critères que l’élève-maitre doit décrire et donner les critères.

L’Education Civique et Morale ECM s’articule, lui, autour de la démocratie, la dictature,  la patrie, la nation, la famille, la corruption, les obstacles au développement, la liberté, la justice, la tolérance…

J’ai eu à corriger en ECM un sujet très intéressant qui renseigne sur la panne de patriotisme que connait le Mali. Le Sujet annonce ceux qui disent « j’aime ma patrie, je l’adore, je la chéris » ne sont pas forcément les plus grands patriotes et demande aux candidats de dire ce qu’est le vrai patriotisme.

Et là, les amis, la catastrophes.  Ils donnent bien facilement la définition de la patrie qu’ils doivent avoir bien écrit sur leur bout de « djinns » en rentrant en classe, mais c’est tout !

Quand il s’agit de donner les critères d’identification du patriotisme, ils vont s’enliser dans des discours creux, parfois insensé qui vont de refus du chauvinisme à la glorification du néocolonialisme, ainsi, je n’ai pu m’empêcher de retenir cette phrase « je félicite les français car ils ont nous sortis dans l’obscurité. Les griots de notre patrie ont organisés une chanson pour les français car la colonisation de notre patrie a été bien fait et la démocratie et les gens sont content nous avons nommé un président. Le patriotisme est l’ensemble des citoyens qui aiment sa patrie ».

3jours de dur labeur pour en finir avec toutes les feuilles, ceux qui ont fini les premiers aidant les autres pour que nous « puissions avoir notre argent rapidement ». La récolte n’a pas été aussi bonne. Mais vivement la correction de l’année prochaine. Cette fois-ci j’espère que nous ne serions pas résident de Bamako. Oh que Tombouctou me manque…

c’est la rumeur qui nous annonce que la rentrée scolaire aura lieu à Tombouctou, d’ailleurs personne ne m’a officiellement informé en avril quand je venais reprendre les cours à Bamako… peut-etre que je fuyais les fouets?

 

 

 

 

 

 

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faty

Commentaires

Limoune
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Que la rentrée prochaine ait lieu à Tombouctou !

Michel THERA
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Contrairement à Limoune, je souhaiterai que tu restes à Bamako. Si possible changes d'école.