Noël à Gao

papa noël en Afrique (credit photo: rablog.unblog.fr)

Ce noël ne ressemble à aucun noël, nul part dans le monde.

Pourquoi? Parce la vieille ville qui était la capitale de l’empire songhaï est une ville foncièrement musulmane islamique. Noel est une fête chrétienne qui n’est pas dans les mœurs.  Ici.

Ici pas question de veillée, ni de repas spécial -foie gras ou canard-, de rassemblement des membres de la famille venus de partout, de cadeaux et surtout le père noël n’a aucune signification pour les enfants de cette ville. Les rues sont toujours désertes. Au loin, le phare que, les soldats chinois venus en dernier à Gao, auraient installé pour scruter le ciel. La ville semble morte. Les pseudo-djihadistes ne pourront pas reprocher à Gao d’avoir célébré cette fête-là pour faire sauter quelque chose voitures piégées ou nous balancer des obus à la tête.

Le slogan «  noël, fête des enfants » ne tient pas ici. Nos enfants ne connaissent rien à noël. Il ne fait pas partie de la culture locale.

Ici, vous pourriez passer la journée à poser la question à tous les enfants sales aux habits plus sales – quand ils en ont- et à la peau de la même couleur que celle des ânes blanc-poussière. Ils vont pieds nus. Pour écrire une lettre au père noël il faudrait au préalable savoir écrire et ensuite connaitre le père noël. Tout le folklore qui touche à Noel en Europe ou plus près, à Bamako ne concerne personne ici. Peut-être regarder la télévision qui se dit nationale pourrait permettre aux grandes personnes de se rendre contre que c’est la fête « chrétiens ». Juste.

On est musulman ici. Tout le monde. Je me rappelle qu’enfant, m’être demandée comment on pouvait croire « ces histoires » qui sont racontés autour de noël ? en réponse, je me suis dite que c’était juste une façon que les riches ont de faire la fête chaque année. Nous ne connaissons pas les cadeaux de noël et seuls les enfants des chrétiens –qui sont comme par coïncidence riches- parlaient de noël, étaient pressés que noël arrive car ils avaient droit à de nouveaux habits, des nouvelles chaussures et pouvaient demander quelque chose à leur père en l’écrivant dans une lettre. On ne s’en mêlait pas, dès l’enfance. Nous avions nos fêtes. C’est suffisant. Nous les attendions.

C’est bizarre, je ne les enviais même pas. Je connaissais déjà la différence entre ces noëls en Afrique et  les « vrais noëls » en Europe avec un gros père noël qui était habillé en rouge et avait une barbe blanche.  Je liais aussi noël à la neige-que je ne connaissais qu’à la télé- qui tombait les soirs de noël dans les dessins animés auxquels j’étais accro à ce temps-là. J’essayais de transposer nos maisons dans ce climat et je me disais que nos toits ne tiendrait pas car ils sont carrés et sans pente.

Mais maintenant je suis d’un rationalisme déroutant, me dit-on. Je suis à Gao et là, il y a-t-il encore un chrétien, pour qu’il puisse permettre à la ville de participer à ces festivités qui sont –somme toute-mondiales ?

Non. Après le passage de Mujao (mouvement d’unicité du jihad en Afrique de l’ouest), c’est impossible de  dégotter un chrétien aujourd’hui. Avant, il pouvait y avoir des fonctionnaires venus du sud, des blancs, des missionnaires qui pouvaient être chrétiens et fêtaient certainement noël. Mais le repli stratégique était aussi confessionnel.  Je sais qu’à Tombouctou, les quelques étrangers étaient restés cachés longtemps avant de pouvoir s’enfuir partir.

joyeux noël à tous ceux qui le fête…

A tous ceux qui ne peuvent le fêter…

Aux enfants pris dans les batailles , qui ne pourront pas comprendre…

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Auteur·e

faty

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